23 décembre 2020

Edito de Jean-Alain Divanac’h, président de la FDSEA

 

 

Les divisions du monde agricole : une aberration face au poids de l’aval !

 

 

Réduisez les pesticides ! Réduisez les antibiotiques ! Réduisez les gaz à effet de serre ! Réduisez la taille des élevages ! Faites plus pour l’eau ! Faites plus pour la biodiversité ! Faites plus pour le climat !

Les associations environnementalistes ont construit leur business sur un « toujours plus » qui se transforme en « jamais assez ». Pour les agriculteurs, les marches environnementales à gravir sont toujours plus nombreuses et toujours plus hautes ; mais pour un revenu bien loin d’être à la hauteur du travail accompli chaque jour. La montée en gamme, érigée en dogme pour nos productions, enfonce le clou planté par les associations environnementalistes. La validation politique et soi-disant sociale de la montée en gamme constitue un formidable prétexte pour les industriels et pour la grande distribution, qui confortent leur diktat économique qui s’exerce depuis des années sur les agriculteurs, sans que quiconque ne s’en émeuve. Et surtout pas Bercy, qui n’a qu’un seul prisme : le pouvoir d’achat des consommateurs français.

Dans ce vaste marasme, l’économie agricole perd ses spécificités qui jusqu’à présent l’avaient épargnée. Jusqu’ici, le collectif construit par nos aînés pour se protéger des maquignons et des négociants a tenu. Mais aujourd’hui, force est de constater le délitement de la plupart de nos outils collectifs, dont certains sont profondément menacés, comme le MPB. Les divisions du monde agricole qui menacent les outils collectifs sont une véritable aberration face au poids écrasant des industriels et de la grande distribution ! Alors que nous devrions plus que jamais resserrer nos rangs, l’individualisme devient légion dans la campagne avec des agriculteurs de plus en plus opportunistes au risque de devenir concurrents entre eux, et des coopératives ou des groupements qui, sans vision de long-terme, jouent solo… quand il ne s’agit pas d’écraser ou de faire main basse sur le voisin. Autant de failles exploitées par les industriels pour imposer aux agriculteurs leurs conditions tarifaires et de volumes, leurs risques de marché, sur fond de chantage abject aux importations et de retour de dividendes aux actionnaires. C’est cela la montée en gamme ? !

Aucune filière n’est épargnée ! Dans chacune, tout peut contribuer à nous diviser et à nous asservir. Nous sommes à un carrefour. Soit nous continuons à nous enfoncer jusqu’à un asservissement qui ne sera qu’un régime d’intégration sans protection. Soit nous choisissons de subir cet asservissement en toute connaissance de cause et nous en négocions les conditions. En 2018, la FDSEA avait intitulé son rapport d’orientation « sous-traitants de nos coopératives ? ». En 2025, voire même avant, nous pourrons enlever le point d’interrogation !

Une autre voie est de se prendre en main collectivement pour ne pas subir le rapport de force et en être acteur. Regroupés et unis dans toutes les filières nous pourrons ainsi peser de tout notre poids face à un aval qui n’a nulle intention d’être un partenaire ni de nous tendre la main tel un chevalier blanc. L’aval ne connaît que le rapport de force. Collectivement, nous avons la possibilité de changer le cours des choses et d’agir pour ne pas subir.